« J’achète toute ma paille pour consacrer mes surfaces à l’alimentation du troupeau »
Dans les systèmes herbagers ou quand le foncier est limité, les exploitations laitières ne produisent pas la paille nécessaire à leurs besoins. Pour s’approvisionner, chacun a son organisation : achat à proximité de paille pressée ou à presser, importation de régions céréalières.
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En moyenne, d’après une enquête de l’Institut de l’élevage, un éleveur laitier produit la moitié de la paille dont il a besoin. Dans les systèmes les plus herbagers, c’est souvent 100 % de la paille qui doit être achetée.
C’est le cas d’Éric Duverger. Producteur de lait bio à Montauban de Bretagne (35), il ne dispose que de 21 ha pour nourrir son troupeau. « A mon installation en 2004, j’ai recréé un élevage laitier sur les terres familiales, explique l’éleveur. Nous sommes dans un bassin agricole dense, de plus la création d’une route 2 x 2 voies a pris du foncier. Plutôt que de courir après un gain hypothétique de foncier, j’ai préféré travailler sur l’autonomie et la réduction des charges en basant ma ration sur l’herbe ».
Plus facile quand on n’a besoin que de petits volumes
Éric Duverger ne produit donc pas de paille alors que son bâtiment est sur aire paillée. Comme les vaches passent une bonne partie de l’année dehors, il lui faut seulement 15 tonnes de paille par an. « Je demande à mes voisins, aux autres adhérents de la Cuma, détaille l’éleveur. Sur la commune, il y a des producteurs de volailles et de porcs, qui ont des surfaces en céréales mais n’utilisent pas la paille, des exploitations où les cultures ont remplacé l’élevage. Donc ils ont de la paille à vendre. Comme je recherche de petits volumes, je trouve assez facilement ». Comme Éric Duverger n’a pas le matériel nécessaire, c’est la Cuma qui presse et transporte cette paille.
Diversifier ses ressources
Nicolas Jamois, éleveur à Le Loroux (35), a aussi fait le choix de consacrer ses surfaces à l’alimentation de son troupeau. « J’ai 35 ha pour nourrir mes cinquante vaches, donc tout est en fourrage, 15 ha de maïs, le reste en prairies, partage le producteur de lait. Depuis 10 ans que je suis installé, ça m’est arrivé deux fois de faire 2/3 hectares de céréales car j’avais des stocks fourragers mais c’est l’exception ».
Pour sa stabulation sur aire paillée, il a besoin chaque année d’une centaine de tonnes de paille. « Pendant quelques années, je me suis approvisionné avec Terrena, qui faisait l’intermédiaire avec les zones céréalières. Une année où le marché de la paille était tendu, j’ai été déçu par leurs services », retrace Nicolas Jamois, qui décide de diversifier ses approvisionnements. « Je travaille avec une entreprise mayennaise qui achète de la paille en plaine et l’achemine chez les éleveurs, détaille-t-il. J’ai aussi recherché de la paille au niveau local pour sécuriser mes approvisionnements ». Même dans un bassin très laitier, comme celui de Fougères où est situé Nicolas Jamois, la restructuration de la filière laitière entraîne une augmentation des surfaces en céréales. « Je trouve de plus en plus à m’approvisionner chez des collègues qui arrêtent le lait pour faire des cultures de vente, remarque-t-il. Avant, l’approvisionnement local représentait un tiers de mes besoins. Cette année, ça sera les 3 / 4 ». Le pressage est assuré par une ETA. Nicolas Jamois et le voisin qui le fournit s’entraident pour le transport.
À proximité ou par achat dans les zones céréalières, à chacun sa solution, l’essentiel est de rentrer une paille de qualité.
À la recherche de l’or jaune
Cette année, les tensions sur l’approvisionnement en paille devraient être particulièrement marquées sous les effets combinés d’une sole en céréales réduite par les difficultés de semis et par des récoltes peu généreuses, en grains comme en tiges.
Les 7 à 8 millions d’hectares, emblavés habituellement, représentent un potentiel de 25 à 34 millions de tonnes récoltables (source Idèle à partir du réseau Inosys 2001/2020). Cette année, il n’y a que 6,8 millions d’hectares. Ce qui réduit d’au moins 15 % les ressources. Qui dit manque de ressources, dit augmentation des prix, qui devraient dépasser les 30 €/tonne pour la paille en andain.
Cette pénurie s’inscrit dans une tendance de plusieurs années à la réduction du gisement en paille. Déjà au niveau des exploitations. Les chambres d’agriculture et l’Institut de l’élevage ont montré une baisse de l’autonomie des élevages herbivores de 56 à 51 % de leurs besoins en paille. À cela, plusieurs explications : la taille des cheptels augmente plus vite que les surfaces en céréales cultivées par les éleveurs, des surfaces consacrées en priorité à l’alimentation du cheptel. Le développement d’autres usages comme la méthanisation réduisent aussi les disponibilités pour l’élevage. Pour réduire leur dépendance, les éleveurs explorent différentes pistes, logettes sur matelas à la place des aires paillées, matériaux alternatifs à la paille comme le miscanthus ou le bois fragmenté.
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